Où aller quand on est sans-domicile ?

Où aller quand on est sans-domicile ?

C’est quoi un hôtel social ? Les hôtels sociaux permettent d’héberger temporairement des personnes privées accidentellement de logement. Qui paye l’hôtel social ? Les hôtels sociaux sont à la base destinés à ceux dont les revenus sont minimes. Le prix est donc abordable (il s’élevait à 20 euros la nuitée en 2008). L’occupant doit donc payer une participation mensuelle symbolique comme redevance de loyer dont le montant varie en fonction des dispositifs mis en place.1 avr. 2022 Comment obtenir un hôtel social ? Comment obtenir un hôtel social ? L’ouverture d’un hôtel social, qu’il soit pour les familles ou pas, nécessite l’attribution d’un agrément obtenu auprès du préfet du département dans lequel se situe l’établissement en question.1 avr. 2022 C’est quoi un logement Siao ? Conformément à l’article L345-2-4 du CASF, le SIAOservice intégré d’accueil et d’orientation assure le meilleur traitement de l’ensemble des demandes d’hébergement et de logement formées par les personnes ou familles sans domicile ou éprouvant des difficultés particulières, en raison de l’inadaptation de leurs …26 août 2019 Quel est le prix d’un loyer d’un logement social ? Du 1er octobre au 31 décembre 2022

Est-ce que la CAF peut se porter garant pour un logement ?
Comment faire pour avoir un logement social au plus vite ?
Comment avoir un HLM au plus vite ?
Est-ce que le maire peut appuyer une demande de logement ?
Quels sont les 3 types de logements sociaux ?
Où avoir un logement rapidement ?
Quel est le montant maximum du FSL ?
Qui peut avoir le FSL ?
Quel salaire pour obtenir un logement social ?
Quelle est la différence entre HLM et logement social ?
Quel est le revenu maximum pour avoir un logement social ?
Est-ce que la mairie peut m’aider à trouver un logement ?
Comment avoir un logement social très rapidement ?
Quel est le montant de FSL ?
Qui a le droit à la FSL ?
Puis je ne pas payer mon loyer ?
Est-ce que la Caf peut m’aider à payer mon loyer ?
Comment payer son loyer sans emploi ?
Est-ce que la CAF peut m’aider à payer mon loyer ?
Est-ce que la CAF peut payer mon loyer ?

Est-ce que la CAF peut se porter garant pour un logement ?

La Caisse l’Allocation Familiale est une structure qui propose des aides financières aux familles dans le besoin. Toutefois, elle ne se porte pas garante du paiement de vos frais de location mais elle soutient les structures d’aide au logement des familles ayant un revenu modeste.

Comment faire pour avoir un logement social au plus vite ?

Vous pouvez faire une demande de logement social, la renouveler et la modifier directement sur Internet. Pour cela rendez-vous sur le portail public : www.demande-logement-social.gouv.fr. Vous pourrez remplir un dossier en ligne et y joindre les pièces justificatives en fichiers numériques (scans ou photos lisibles).

Comment avoir un HLM au plus vite ?

Il est conseillé de se rendre directement en préfecture ou à la mairie, pour gagner du temps. Autrement, vous pouvez déposer votre document dans votre entreprise, si celle-ci emploie plus de 20 personnes et qu’elle cotise à l’action logement.9 juin 2022

Est-ce que le maire peut appuyer une demande de logement ?

Le maire peut proposer des candidats en fonction des logements qui lui ont été réservés, tout comme peut le faire Action logement. L’État, sur le contingent préfectoral, peut proposer des candidats qui répondent aux critères des ménages prioritaires.

Quels sont les 3 types de logements sociaux ?

Les locataires peuvent accéder, sous certaines conditions, à des logements à loyer modéré. Ceux-ci sont désignés selon le mode de financement qui a permis de les construire : logements PLAI, PLUS, PLS et PLI.

Où avoir un logement rapidement ?

Il existe des solutions pour les personnes qui doivent trouver un logement en urgence :

Quel est le montant maximum du FSL ?

le montant de l’aide correspond au montant de la dette, 1 000 € de secours maximum, uniquement pour les ménages ayant repris le paiement de leur loyer depuis au moins 3 mois.14 avr. 2021

Qui peut avoir le FSL ?

Toute personne occupant un logement et rencontrant des difficultés financières peut bénéficier du Fonds de Solidarité au logement : Locataire. Propriétaire occupant le logement. Personne hébergée à titre gratuit.7 juil. 2022

Quel salaire pour obtenir un logement social ?

2 personnes

Quelle est la différence entre HLM et logement social ?

2. Les logements sociaux PLUS. L’acronyme PLUS correspond à Prêt Locatif à Usage Social. En d’autres termes, il s’agit des habitations à loyer modéré, les HLM.24 mars 2021

Quel est le revenu maximum pour avoir un logement social ?

2 personnes

Est-ce que la mairie peut m’aider à trouver un logement ?

Le maire peut proposer des candidats en fonction des logements qui lui ont été réservés, tout comme peut le faire Action logement. L’État, sur le contingent préfectoral, peut proposer des candidats qui répondent aux critères des ménages prioritaires.27 sept. 2021

Comment avoir un logement social très rapidement ?

Il est conseillé de se rendre directement en préfecture ou à la mairie, pour gagner du temps. Autrement, vous pouvez déposer votre document dans votre entreprise, si celle-ci emploie plus de 20 personnes et qu’elle cotise à l’action logement.9 juin 2022

Quel est le montant de FSL ?

l’assurance ne sera prise en charge qu’en cas de première installation; un montant forfaitaire est attribué en fonction de la taille du logement : T1-2 = 75 € ; T3 = 90 € ; T4 = 105 € ; T5 = 120 € ; T6 et plus = 135 €

Qui a le droit à la FSL ?

Toute personne occupant un logement et rencontrant des difficultés financières peut bénéficier du Fonds de Solidarité au logement : Locataire. Propriétaire occupant le logement. Personne hébergée à titre gratuit.7 juil. 2022

Puis je ne pas payer mon loyer ?

ne pas payer le loyer et les charges est un motif de résiliation du bail par le propriétaire et d’expulsion du locataire. Payer en partie peut avoir les mêmes conséquences, sauf si le locataire n’est pas en cause (exemple : non-versement des aides au logement en cas de logement non décent ).

Est-ce que la Caf peut m’aider à payer mon loyer ?

Le montant de votre aide au logement est calculé avec vos ressources des 12 derniers mois. La Caf récupère automatiquement vos ressources les plus récentes, mais certaines ressources ou charges annuelles de 2021 sont à déclarer.

Comment payer son loyer sans emploi ?

Si vous n’arrivez plus à payer votre loyer, vous avez peut-être droit à une allocation logement (APL, ALF ou ALS). Il existe aussi des aides du Fonds de Solidarité pour le Logement (FSL).6 mai 2020

Est-ce que la CAF peut m’aider à payer mon loyer ?

Le montant de votre aide au logement est calculé avec vos ressources des 12 derniers mois. La Caf récupère automatiquement vos ressources les plus récentes, mais certaines ressources ou charges annuelles de 2021 sont à déclarer.

Est-ce que la CAF peut payer mon loyer ?

Cependant, la CAF peut vous verser une allocation logement (AL) pour vous aider à payer votre loyer. Vous pouvez aussi peut-être bénéficier d’aides pour payer vos factures de gaz et d’électricité. Pour en savoir plus, rendez-vous sur notre page dédiée.


-Si tu veux pas me donner de l’argent, parce que t’as peur que je boive avec cet argent, que je me drogue avec cet argent, va m’acheter un sandwich. Donne-moi un Ticket-Restaurant. -« Les parents ados sont des cassos ». -« Être SDF, c’est être drogué et alcoolique ». -C’est un peu compliqué, là, par contre. -Laisse-moi finir, s’il te plaît, sinon je vais m’énerver contre toi. -Donc j’ai su que j’étais enceinte à 14 h et j’ai accouché à 18 h. -Je vais rechercher ça, là. -Non. Parce que moi, des fois, je supporte Marine. -QUOI ? -Je m’appelle Éric. J’ai 59 ans pas depuis longtemps, et j’ai vécu dans la rue en tant que SDF pendant une dizaine d’années. -Je m’appelle Marine. J’ai 21 ans, et j’ai été SDF de septembre à décembre 2020. -Je m’appelle Élina Dumont. J’ai vécu pendant 15 ans sans domicile fixe. Aujourd’hui, je suis comédienne et experte à la Région sur toutes les questions qui concernent le sans-abrisme. -Je m’appelle Sabrina. J’ai 46 ans. Je me suis retrouvée à la rue suite à des violences conjugales. Donc j’ai vécu deux ans pleins sans hébergement, sans rien. -Moi, je suis Edson Laffaiteur, 36 ans, huit ans de rue. Je suis un ancien squatteur qui a décidé un jour d’ouvrir des squats pour les autres. -Je m’appelle Pierrick. J’ai 30 ans. Je viens de reprendre les études, un doctorat de sociologie et sur les 5-6 dernières années, j’ai été… Soit j’ai été au chômage, soit… Bah je me suis retrouvé un peu en galère, donc j’ai été hébergé chez des proches à plusieurs reprises. -« Si tu es dans la rue, c’est que tu l’as choisi ». Il y a du boulot. -Pour moi, c’était un choix personnel de me retrouver à la rue. Je me retrouvais pas dans la société. Je préférais vivre de vadrouille à vadrouille, de devoir rien à personne et être libre de mes mouvements. Et de pas me prendre la tête avec une domiciliation, les papiers, le RSA, le ceci. Je ne dépendais de rien. -Souvent, j’ai entendu les sans-abris dire : « Ouais, c’est moi qui ai choisi. « De toute façon, si je suis à la rue, c’est parce que je suis bien et tout. » Moi aussi, je l’ai pensé pendant très, très longtemps au point que, quand j’ai eu 35 ans ou 36 ans, je me disais : « Oh, bah après tout, c’est pas si mal que ça. « Je vais de foyer en foyer. « Je trouve des petits boulots. » La rue amène forcément des traumatismes. Et on n’est pas à la rue par hasard. Il faut souvent remonter à l’enfance. J’ai compris après de longues années de psychothérapie qu’en fait, au plus profond de moi, j’avais pas du tout envie d’être à la rue. Au bout de 15 ans, par exemple, comme moi, je l’ai été, ou au bout de 17 ans, on s’en convainc. Mais c’est mieux de s’en convaincre, parce qu’on souffre moins. -Oui, juste pour te dire… Je vais juste rebondir sur un mot que tu viens de dire. Moi, je dis que c’était mon choix. J’ai pas dit que c’était ma volonté. Il y a deux choses différentes entre la volonté de se retrouver à la rue… On veut pas être à la rue. Aucun de nous ne veut jamais et ne voudra jamais être à la rue. Mais tu peux faire le choix d’y aller. Moi, j’ai fait le choix. C’est deux choses différentes. -T’avais une phobie de l’administration. -Oui, c’est ça. -C’est pas un vrai choix. -Mais c’est un choix. J’ai fait mon choix de me décrocher. J’ai brûlé ma propre carte d’identité. -Non, mais… -Je ne voulais plus ni être français, ni quoi que ce soit. Je n’avais pas de papiers. Ma carte d’identité, je l’ai refaite à la naissance de mon fils pour le reconnaître. -Oui. -Sinon, je l’aurais pas refaite, ma carte d’identité. -Donc si tu t’étais fait soigner contre la phobie administrative, bah peut-être que tu n’aurais pas été à la rue. -Si la France m’avait donné envie de vivre. -Ah. Déjà, t’as vu ce que tu dis ? -Tu vois ce que je veux dire ? Ils m’ont pas donné envie. Donc j’ai fait le choix de disparaître. -C’est toi qui crois que la France a pas donné envie. -Ah non, mais c’est sûr. Moi, elle m’a pas donné envie. Et elle me donne toujours pas envie. -Je trouve qu’il y a des facteurs qui encouragent cette volonté effectivement de s’exclure de la société, parce que j’ai déjà côtoyé des personnes qui avaient la même vision que toi et la même pensée. Je comprends sans comprendre, parce que je partage pas du tout le point de vue. Mais j’entends, en fait, ta volonté de… De t’enlever de tout ce qui te dérange et ce qui te perturbe en fait dans tout ça. Mais c’est toujours compliqué parce que ça implique ta santé. Ça implique ton mental, les conditions de vie, etc. -Moi, c’était pas du tout un choix, moi. Moi, je me suis retrouvée à la rue à cause de la justice française, donc… J’ai été privée de mes droits, j’ai été expulsée de mon logement. En tant que femme, c’est très dur. On a le choix de s’en sortir. Là, pour moi, ça, c’est un choix, de s’en sortir. Mais le choix d’aller vivre dans la rue, sincèrement, s’ils veulent des sensations fortes, les gens, ils peuvent s’inscrire à « Koh-Lanta ». Parce que vivre dans la rue… Quand même, vivre dans la rue, survivre dans la rue, puisqu’on vit pas dans la rue, on est dans le doute tout le temps. On sait pas où on va dormir. On sait pas où on va manger. On sait pas où on va se laver. On sait pas qui va nous tomber dessus. Il faut être maso… Excuse-moi, hein. Il faut être maso pour faire le choix d’aller vivre dans la rue. -Bah je suis maso. -Moi, non. C’était vraiment pas un choix. J’ai fait un burn out il y a déjà 15 ans. Je suis arrivé en France, parce que je viens de Belgique. Et donc, bon, j’ai fait des petits boulots. J’ai pris des vacances. Je me suis guéri plus ou moins du burn out. Et puis je suis monté à Paris et là, je me suis retrouvé dans la rue. Et dans la rue, bah je me suis battu tout doucement, petit à petit, beaucoup contre l’administration qui… ne m’accordait pas, par exemple, le RSA, parce qu’on me considérait comme un… Comme quelqu’un hors de l’Union européenne. Alors que la Belgique, il me semble que c’est quand même la créatrice. Voilà. De centre d’hébergement en centre d’hébergement, j’ai fini par tout plaquer et retourner à la rue. Et j’ai eu l’aide de beaucoup de gens. Mais j’avais toujours en moi cette volonté de m’en sortir. J’ai rencontré des gens de l’association Entourage qui m’ont redonné un peu de goût de vie, qui m’ont redonné l’envie de… D’être utile, de travailler pour eux. Façon de parler, travailler, c’était du bénévolat. Et avec ça, bah j’ai pu retrouver un travail. Donc aujourd’hui, je suis installé. Je suis sorti de là. Mais le problème, c’est que beaucoup de gens dans la rue se disent : « J’en sortirai jamais. » Eh bien non. On peut s’en sortir. Il faut pas croire. -On peut. On l’a tous fait. -Bah moi, je différencie quand même l’expérience de rue et l’expérience sans domicile. Parce que bah moi, mon expérience, c’est pas une expérience de rue. C’est une expérience où… Des moments de galère, des moments de perte de travail, perte de droits, etc., où je me retrouve obligé de chercher de l’aide pour être hébergé. J’ai eu de la chance de toujours trouver de l’aide. Par contre, clairement, à aucun moment, je me suis retrouvé sur un canapé d’un ami ou à retourner chez des membres de ma famille en me disant : « Bah là, je suis bien. Je vais y rester, quoi. » C’est… C’est clairement… Et en même temps, pour revenir sur ce que tu disais toi, j’ai aussi un moment eu moi une période de ma vie où je me suis dit… Bah cette fois, j’avais eu un appart, j’avais un boulot un peu pourri, quoi. Et à un moment, le contrat s’arrête et moi, je me dis : « Mais qu’est-ce que je fais ? » Et bah moi, une fois, ouais, j’ai pris mon sac à dos et je suis allé dehors, quoi. Parce que je trouvais aucun sens… -Donc t’as fait ton choix d’aller dehors au lieu de te battre encore pour pouvoir essayer de… -Ouais. -T’as fait le choix. -Et quand j’étais dehors, j’ai très, très vite regretté. -Quand tu fais une connerie, tu sais les conséquences. Moi, j’ai fait le choix de faire ces conneries-là. Donc je savais qu’au bout d’un moment avec les conneries que je faisais, je me retrouverais soit enfermé, soit à la rue. Je savais mes choix. Donc j’assumais et c’est pour ça que j’ai dit : « Oui. J’ai fait le choix d’aller à la rue ». Parce que je savais que ce que je faisais avant pouvait me conduire vers cet engrenage et vers cette rue-là. -Moi, j’ai pas choisi d’être à la rue. J’avais un logement. J’étais étudiante. Donc j’étais logée en logement Crous. Suite à ça, donc j’ai postulé pour la 3e année de mes études, en fait. J’ai pas été acceptée, alors du coup, j’ai dû trouver un travail pour payer mon loyer, bien évidemment. J’avais pas les deux mois de salaire, enfin, les trois mois de salaire quand il a fallu trouver un appartement. J’avais pas de personne pour la caution, etc., non plus. Donc du coup, j’ai perdu mon appartement. J’ai loué un garage pour stocker mes affaires et mes meubles. Et je comptais vivre dans mon garage, ce qui n’était pas possible, parce qu’il y avait pas d’eau, pas d’électricité et que j’avais un travail et que je voulais pas le perdre. Je me disais : « Si je perds mon travail, c’est… C’est la fin, quoi. » C’était le seul truc qui me raccrochait à une vie « normale » et heureusement que je travaillais, franchement. Et j’ai finalement été dans un squat. Donc on était environ 80. C’était dans un ancien collège. Et heureusement que j’y étais, parce que j’ai perdu beaucoup, beaucoup d’amis juste avant ça. Beaucoup m’ont trahie, mon ex, etc., donc je me suis retrouvée un peu vraiment toute seule. Donc j’ai fait des mauvaises rencontres, mais des excellentes aussi. Et franchement, voilà. Ils m’ont apporté beaucoup. -« Être SDF, c’est être invisible ». -J’aime bien cette phrase. -Oh, mais je reste debout, là. -C’est tout à fait vrai. Moi, pendant 1 an et demi, j’ai fait la manche à la sortie d’un métro à Paris. Et quand vous voyez 300, 400, 500 personnes en une heure qui passent à côté de vous et qui ne vous regardent même pas, on est franchement, franchement invisibles. On a l’impression d’être un sac d’os, des vieux os. On n’est rien, quoi. On n’existe pas. Il y a pas un seul sourire. Il y a rien du tout. Alors arrêtez de regarder les gens dans la rue comme des gens qui n’existent pas. N’hésitez pas. Approchez-nous. Agenouillez-vous, dites-nous bonjour et vous découvrirez beaucoup de choses que vous ignorez. -Beaucoup de richesse. -Voilà. -Perso, j’ai jamais fait la manche. Pour moi, c’était quelque chose qui était pas possible, en fait. Donc… Après, je peux pas dire qu’il y a pas de personnes qui sont pas venues me parler. Mais c’est vrai que ces personnes-là étaient gênées, en fait, de pas pouvoir donner un sandwich ou une bouteille d’eau, mais le fait de dire bonjour avec un sourire, déjà, ça éclaire beaucoup la journée des personnes sans abri. C’est d’ailleurs aussi pour ça que beaucoup d’entre nous, on maraude encore. Le problème qui se passe aujourd’hui, c’est que… On se dit : « Ah bah si on leur donne pas un euro, « si on leur donne pas un Ticket-Restaurant, ils vont nous envoyer chier. » Alors, ça existe. Et effectivement, il y a des personnes qui sont dans une telle souffrance qu’ils ont pas forcément envie de parler, mais un sourire ça coûte rien et ça apporte beaucoup aux gens qui le reçoivent. -Vous n’imaginez pas le nombre de fois où j’ai parlé à des personnes qui ne me donnaient rien, mais à qui j’ai remonté le moral. -Éric, alors là, tu te contredis du coup. T’étais pas invisible. -Non, parce que ceux-là avaient appris à me connaître. Mais petit à petit. Ça, ça fait partie des gens qui te regardent. Mais ça dure… T’en as un tous les trois jours qui vient te voir. -C’est pas parce qu’il y en a un qui s’est arrêté ou un couple s’est arrêté parler avec lui qu’il est plus invisible. -Je suis invisible quand même pour tous les autres. -Il y en avait 500 qui sortaient de la bouche d’ég… D’égout, j’allais dire. De la bouche du métro. Et il y en avait un qui parlait. -C’est vrai que c’est pas toujours propre. -Tout dépend, déjà, de la personnalité de la personne. Moi, j’étais à la rue à 18 ans suite à la fin de la prise en charge de l’aide sociale à l’enfance. J’allais dans les boîtes de nuit. Je rencontrais des types. Ils m’emmenaient à des fêtes, mais moi, je suis quelqu’un de gai, qui aime se marrer. J’ai toujours adoré parler aux gens. C’est comme ça que j’ai eu des ménages. C’est comme ça qu’on m’a fait garder des enfants. Vraiment, je n’ai pas cette sensation. Et je pense quand même que ça dépend beaucoup de la façon dont les sans-abris se comportent. Moi, je suis tout à fait comme toi, Sabrina. Je n’ai jamais, jamais fait la manche. Je ne me suis jamais assise par terre. Peut-être avec l’âge que j’ai, je tomberais à la rue, peut-être que je ressentirais ce que vous dites. -Je trouve que le terme non plus SDF me convient pas vraiment, parce que j’ai toujours eu un toit sur la tête, en fait. Et je trouve qu’il y a quand même une grande différence, déjà. -Il y a la différence entre sans-abri et sans domicile fixe. -Voilà. -Il faut vraiment faire la distinction. Sans domicile fixe, ça veut dire ce que ça veut dire. C’est qu’on n’a pas de domicile proprement parler. Un jour, on est là. Un jour, on est là. Mais il y a quand même un toit sur la tête. Sans-abri, c’est… On n’a pas de toit sur la tête. -Les gens trouvent qu’on est invisibles, qu’on est des moins-que-rien et ça, c’est… C’est scandaleux. Ils pensent qu’on n’est pas éduqués, qu’on n’a pas de diplômes, qu’on n’a rien, qu’on est vraiment là parce qu’on le veut. Enfin, il y a 36 000 préjugés qui existent qui sont… presque tous faux. -Combien de fois, quand t’as posé ton bonnet ou ta casquette par terre pour faire la manche, combien de gens se sont pris les pieds dans ton bocal ou dans ton bonnet ? Combien de personnes marchent dedans et piétinent ? -C’est extrêmement rare. -Personne le fait ? -Je tenais le gobelet à la main. -Ah, tu tenais le gobelet à la main. -Bah oui. -Mais même moi, ça m’est déjà arrivé quand je suis sur mon téléphone. -Mais combien de fois… Tu regardes les gens qui font la manche, ils ont leur petit truc devant. Les gens, ils arrivent dedans. Bam ! T’entends toutes les pièces qui balancent partout. Ils sont complètement invisibles. -Ah moi, c’est simple. En deux ans de rue, il y a personne qui m’a vue. Mais vraiment personne. Que ça soit l’administration, les amis, la famille, les personnes qui nous ont été chères avant, du jour au lendemain, on les voit plus. Plus de nouvelles. Ils cherchent même pas à savoir si on est encore en vie. Il y a… Voilà. Donc pour moi, ça, c’est de l’invisibilité. Je me suis même demandé si mes vêtements étaient pas une cape d’invisibilité. -Harry Potter, sors de ce corps. -Bah moi, justement, au contraire, quand j’ai eu des périodes de galère, bah c’est là que j’ai vécu que de solidarité, en fait. C’est ce qui fait que j’ai toujours eu un abri. Après, bah je me promenais beaucoup. J’étais obligé pour pas rester longtemps chez les gens et puis moi aussi, pour pas péter un câble, en fait. Et c’est paradoxal… Paradoxalement, je me suis mis ici, parce que bah oui, moi, j’étais en galère et plein de gens m’ont aidé. Mais intérieurement, je me vivais… Enfin, j’étais aidé. J’avais un toit. J’avais un abri. Mais j’avais rien d’autre quoi. -Oui. -Tu te sentais seul. -Je me sentais hyper seul. Je me sentais nulle part chez moi. Je me sentais… Je me sentais inutile. En vrai, je me sentais invisible. -Moi, j’ai tout perdu. Ça fait huit ans que j’ai pas vu ma famille. Ça fait maintenant plus de huit ans, quoi, que j’ai pas vu ma famille. Moi, la dernière fois que j’ai vu ma famille, c’était en 2013. Donc tu vois, un petit bout de temps. La rue fait perdre beaucoup de choses, parce que t’as honte forcément de leur dire. Parce que ta famille… Moi, c’était pas mes parents biologiques. Moi, je suis un enfant adopté, donc c’était ma famille d’adoption. Ma famille d’adoption, j’avais pas envie forcément de leur dire ce que je suis devenu parce qu’eux, ils m’ont forcément payé des études ou autre chose, tu vois. Donc je voulais pas non plus les décevoir. -Mais tu dis que t’as honte de leur avoir dit, t’as honte de leur demander des conseils, mais je pense que c’est plutôt ce que j’appelle de la pudeur. C’est de la pudeur, parce que tu as peur de les fâcher et t’as peur qu’ils aient honte pour toi. Dans la vie, quand tu es dans la rue ou sans-abri ou SDF, tu as besoin de demander aux autres. -« Être SDF, c’est avoir peur de la mort. » -C’est aucun des deux. -On peut avoir peur, mais… on apprend à braver la mort. Je pourrais être dans le vrai, je pourrais être dans le faux. Je… Parce qu’effectivement, être dans la rue, bah la nuit, il y a plein de choses. Comme disait ma grand-mère, la nuit, tous les chats sont gris. Donc on sait pas sur qui on peut tomber. Moi, je sais qu’aujourd’hui, j’ai plus peur, quoi, en fait. J’ai pas peur de la mort. Je me dis : « Avec tout ce que j’ai traversé, tout ce que j’ai vécu, « mais j’ai une bonne étoile au-dessus de ma tête, quoi. » -Ouais, je suis assez d’accord avec Sabrina, parce qu’il faut savoir qu’en France, il y a deux morts tous les jours de mort de la rue. Donc il y a énormément de gens qui meurent. L’année dernière, il y a eu 517 morts dont 2 que je connaissais. Cette année, depuis le début de l’année, on est à 200 et quelques. Donc il y a de plus en plus de morts de la rue et on n’en parle pas. Les politiciens, ils en parlent pas. La preuve, ils font rien pour eux. Ils font rien pour changer ça. Les chiffres que je vous donne, ce sont que des chiffres que justement le collectif des Morts de la Rue donne. Ce sont des chiffres connus et heureusement qu’il y a ces organismes-là dont je fais partie aussi… On est là pour pouvoir le dire, mais… Malheureusement, il y a beaucoup plus que ça. Malheureusement, les chiffres, ils sont bidon. Parce qu’on retrouve pas tous les gens. Cyril, Damien, Paul, Marie, ce sont tous des prénoms de sans-abris qui ont disparu. Est-ce que les sans-abris ont peur de la mort ? Je pense, comme tout le monde, ils ont peur de mourir un jour ou l’autre. Mais est-ce que la rue… La rue tue. Ça, c’est sûr et certain. -C’est vraiment une expérience de glissement, moi. C’est… Bah ouais, étudiant ou jeune travailleur, puis en recherche d’emploi, puis hébergé chez des potes et vraiment, je visualise ça comme une pente et à la fin de la pente, il y a la mort, quoi. Et j’y pensais tout le temps, quoi. Vraiment, c’est… Et… Alors peut-être pas peur au sens où je me dis : « Putain, ça peut arriver demain. « Ça peut arriver n’importe comment et tout », évidemment. Je sais qu’en plus, en France… Ouais, en gros, la faim, normalement, ça va, on peut s’en sortir. C’est le froid, quoi. Donc moi, j’étais pas dehors, mais… -Ou le chaud. -Et le manque de sommeil. Et au niveau des sans-abris ou sans domicile fixe, hein, pareil, bah il y a un manque de sommeil évident. -D’après moi, la sécurité… Il y a une sécurité vitale, c’est l’abri qui est dénié dans notre monde, dans la manière dont notre monde est organisé, et du coup, par définition, je pense que sans-abri, c’est être aux prises avec la possibilité de mourir, quoi. Pour les causes dont on a parlé. Et bon autrement, moi, sur les moments où j’ai dormi sous une tente, clairement, là, pour le coup, moi, mon sommeil, quasiment… Adieu. Il y a le couteau. Il y a… Enfin… -Il y a tout, quoi. -Tu te réveilles tout le temps, le moindre bruit, la lumière. Les gens qui te jettent des trucs ou qui viennent dire des trucs. Enfin… Donc pour moi, c’est un bras de fer vraiment avec la mort, tout le temps, avec l’idée de mourir, en tout cas. -Je pense que tout dépend quand même de la personnalité de la personne. Je n’ai jamais pensé à la mort et pourtant, je sortais avec des types qui sortaient de prison, qui avaient fait des braquages. Je suis tombée dans le crack. Je suis tombée avec des… Mais ça m’est jamais venu dans la tête. Alors je reviens aussi… J’étais jeune. Et quand on est jeune, on est aussi insouciant. -T’es jeune et là, regarde ce que je vais faire. Le 23 mai 2019, un jeune de 23 ans, il était jeune, s’est pendu à 5 mètres de moi, après avoir appelé le 150. Après avoir appelé, excuse-moi, le 115… Après avoir appelé le 115 plus de 150 fois. Donc lui non plus, il avait pas peur de la mort. -Attends. Écoute ce que je te dis. Tout dépend de la personnalité. -On m’a élevé à ne pas penser à la peur. Même s’il y a des trucs qui me font peur. Bon, ne me parlez pas de « Scream » et des films comme ça. Ça, j’en ai peur. Je veux même pas les regarder. Mais je me suis dit, une fois que j’étais à la rue : « Oui, mais j’ai entendu dire qu’il y avait des bagarres, « il y avait des trucs comme ça. » Je n’ai jamais été victime d’une seule bagarre. J’ai jamais été agressé. Mais alors ce qui est de penser à la mort, non. -Moi, j’y ai pensé après. -Je pense que la plupart… -Moi, j’y ai pensé après la sortie de la rue. -Je pense que la plupart des gens dans la rue se disent : « De toute façon, au point où on en est, « si on part, on part. On verra bien quand ça va arriver. » -Bah j’ai eu la chance d’être toujours entourée et d’avoir un groupe, d’ailleurs, je les remercie, qui a toujours été là pour moi et qui m’a protégée parce que j’étais un peu la petite sœur de tout le monde. J’étais une des plus jeunes et tout ça, donc… J’ai eu la chance qu’on m’entoure, qu’on me soutienne et qu’on me protège. Mais non, c’est vrai que du coup, j’ai jamais eu cette peur. En fait, comme tu l’as dit, je l’ai eue après, par contre, quoi, en contrecoup. -Oui, c’est après. C’est en contrecoup. -Parce que quand je m’en suis sortie, je me suis rendu compte : « Ah ouais, quand même. » En règle générale, quand même, il y a beaucoup de femmes qui sont victimes d’agression, on va pas se mentir. Que ce soit dans la rue, dans les squats, n’importe où. Dans les personnes que j’ai côtoyées, les femmes, il y en a énormément. Au-delà de ça, le traumatisme de la violence du conjoint, de toutes ces choses-là. Il y a beaucoup de femmes seules, seules avec des enfants, beaucoup de personnes qui quittent tout du jour au lendemain et qui se retrouvent seules, démunies et sans réponse. En plus, s’il y a la barrière de la langue qui s’y rajoute ou la méconnaissance des démarches, c’est la totale, quoi, donc… -Ah ouais. C’est double peine. C’est double peine. Déjà, on n’a pas la même résistance physique qu’un homme. Il faut quand même… Il faut quand même le dire. Forcément, si une femme va vers un homme sans abri, on va pas penser à mal. Par contre, si un homme vient vers une femme sans abri, 3 fois sur 4, c’est pour proposer des… Voilà, des… Des services contre un rendu, quoi. Donc… Après, on accepte ou on n’accepte pas. Moi, personnellement, j’ai pas… J’ai pas… J’ai refusé. J’étais en plus dans un traumatisme, parce que moi, c’était suite à des violences conjugales. Et en plus, on venait de m’enlever mes enfants, donc j’étais dans un triple traumatisme. Donc pour moi, ça a été vécu vraiment comme une souffrance. Mais pas pendant que j’étais dans la rue. Parce que pendant que j’étais dans la rue, j’avais le moteur de m’en sortir, justement. De me battre pour récupérer tout ce qu’on venait de m’ôter. C’est le contrecoup, après. Ça a été quand je me suis sortie de la rue que là, je me suis dit : « J’ai vraiment bravé la mort en fait. » -Moi, je… Je voulais tellement pas dormir dehors, à l’idée qu’il y ait un taré qui me tombe dessus… Moi, un mec me proposait d’aller chez lui, moi, je couchais avec lui. Moi, le principal, j’étais au chaud. Les bourgeois, ils m’ont emmenée dans toutes les boîtes échangistes de Paris. Moi, je disais oui. Le principal, c’est que j’étais au chaud. Il y avait du champagne et tout. Enfin, bref. Mais j’ai des copines qui, elles, n’ont jamais accepté. Mais quand on fait un retour en arrière, moi, pendant toute mon enfance et toute mon adolescence, j’ai été abusée, ce qui fait que quand je suis arrivée à la rue, moi, faire une fellation ou coucher avec un type, j’en avais rien à faire. C’était la suite logique. -Mais attention, pour moi, c’est pas du tout un jugement. -Non, mais je le sais. -J’explique que de toute façon, un homme… Vu le traumatisme que je venais de subir par, aujourd’hui, mon ex-mari, un homme, s’il m’approchait, c’était forcément pour me faire du mal. Donc j’étais pas du tout dans cette optique-là, quoi. -Pas moi. Moi, j’avais compris qu’il voulait coucher avec moi et je me disais : « Tiens, ce soir, je vais coucher au chaud. » -« Être SDF, c’est être drogué et alcoolique ». Rires. -C’est un peu compliqué, là, par contre. -En fait, j’ai commencé à boire de l’alcool en sortant de la rue. Donc être sans-abri ou SDF, alcoolique et droguée, c’était pas du tout mon cas. Par contre, c’est après, oui. Après, je me mettais bien. Que ça soit mon psy ou mes deux psy d’ailleurs… Mon thérapeute et mon psychiatre, ils m’ont pas rangée dans le camp des alcooliques alcooliques. C’est pas un alcoolisme tous les jours, abusif. Non. Moi, c’est vraiment quand il y a des chocs émotionnels, je prends le dessus. Comme mon cerveau tourne en permanence, à un moment donné, je vais aller me prendre une bière, deux bières, trois bières jusqu’à temps que mon cerveau s’endorme et que je dorme. -Personnellement, je n’ai jamais bu une goutte d’alcool de ma vie. J’ai 36 ans. Je ne connais pas le goût de l’alcool. Je n’ai jamais goûté à l’alcool de ma vie. J’ai huit ans à la rue. Et en étant huit ans à la rue, j’ai côtoyé énormément de sans-abris qui boivent. Mais moi, je n’ai jamais bu de ma vie. -Il suffit de regarder le nombre d’alcooliques qui existent en France. Il y a pas plus d’alcooliques au terme… officiel. Au sens officiel du terme, dans la rue qu’avec abri. -Ça justifie aussi le fait de pas aider les sans-abris. -Oui. -Ils se donnent en fait… Ils se donnent une excuse pour dire : « Je le fais pas à cause de ça. » Mais alors dans ce cas-là, va m’acheter un sandwich. Si tu veux pas me donner de l’argent, parce que t’as peur que je boive avec cet argent, que je me drogue avec cet argent, va m’acheter un sandwich. Donne-moi un Ticket-Restaurant. Là, je pourrai pas acheter de l’alcool avec. Je pourrai pas acheter du shit avec. Je pourrai pas acheter de la coke ou autre chose avec. Je vais acheter ce que tu m’as donné, un Ticket-Restaurant pour aller au restaurant. Point. Mais malheureusement, aujourd’hui, beaucoup de gens disent : « Tous les sans-abris, toutes les personnes qui vivent à la rue « sont des alcooliques ou des drogués. « Si on leur donne des aides financières, c’est pour l’alcool ou pour la drogue. » -Moi, je trouve qu’il y a un cliché qui est aussi lié à ce cliché. Il est en rapport. Il y a beaucoup de gens qui estiment que les personnes qu’on voit effectivement dans la rue alcoolisées, droguées ou que sais-je, qu’elles sont dans la rue parce qu’elles sont comme ça. Mais souvent, c’est l’inverse. Elles sont comme ça parce qu’elles sont dans la rue. Mais c’est aussi un moyen de s’évader de la réalité. -De se réchauffer. -Peut-être, j’en sais rien. -Attends. Excuse-moi. Je voudrais nuancer là-dessus. Pour ma part, donc dans ma vie… Maintenant, ça fait 15 ans que je lutte contre le sans-abrisme. Tous les sans-abris que j’ai connus, ils buvaient tous. D’ailleurs, ils sont tous morts de l’alcoolisme. -Mais tu me connais, moi. -Et faut savoir, et ça, on n’y pense jamais, mais il y a beaucoup de gens qui se retrouvent à la rue parce qu’ils sont alcooliques. -Je trouve que c’est pas la majorité, moi, je trouve. -Si, attends. Parce qu’ils perdent leur travail. Parce qu’ils perdent leur femme et un jour, ils se retrouvent à la rue. Je pense quand même que la rue, elle est propice à te faire avoir. Moi, la première fois qu’on m’a fait goûter du crack, j’ai pas dit : « Ah, c’est pour m’év… C’est pas… « C’est pas pour me faire du bien. » Non. On m’a fait goûter deux fois, trois fois, cinq fois et puis après, je suis tombée dedans. -Mais du coup, t’es tombée dedans parce que tu étais à la rue. T’es pas allée à la rue, parce que… -C’est ce que je te dis. -Bah oui. -Je te dis, la rue est quand même très propice pour devenir addict. -À la limite, ce qui me révolterait dans ce cliché-là, c’est un peu tout ce que vous avez dit. C’est… SDF, alcoolique et drogué, et alors, quoi ? Parce que c’est hors sujet, quoi. Les alcooliques et les drogués, il y en a ailleurs. Et il faut traiter ce sujet-là. -Bien sûr. -Et ça veut dire quoi quand on dit ça ? Ça veut dire qu’on dit : « Bon bah, alcooliques et drogués, donc… » C’est disqualifiant, quoi, alors qu’à l’inverse, ça devrait être d’autant plus inquiétant de se dire qu’il y a des gens à la rue qui sont addicts ou qui sont alcooliques. C’est… Ça devrait être un sujet d’autant plus important. -Je connais plus de gens qui prennent des drogues… Je parle de drogues dures, hein. Je parle pas du petit chichon. Je connais plus de gens qui prennent des drogues dures qui ont un appartement 5 étoiles que de sans-abris. Personnellement, quand moi, j’étais à la rue, j’étais obligé de me débrouiller un petit peu pour avoir à manger, donc je vendais. Et j’avais des clients riches qui venaient et qui avaient leurs appartements et leurs maisons. -Il y a quelque chose qu’il faut quand même dire… Bien sûr que moi aussi, je connais des gens qui prennent de la coke de temps en temps. Mais ça les empêche pas d’aller travailler. Ça les empêche pas de… D’élever leurs enfants. Alors que quand t’es pris, t’es addict dans la rue, alors là, je peux t’assurer… -Tu te rajoutes une charge. -Tu te rajoutes une charge. « Quand on est SDF, on ne veut pas s’en sortir ». -Aujourd’hui, je côtoie énormément de personnes qui sont à la rue et bah parmi ces personnes, il y en a qui veulent s’en sortir. C’est vrai. Mais j’en connais aussi qui ne veulent pas s’en sortir. Ils me le disent clairement. Ils disent : « Non. Je ne veux pas. » Il y a trois jours, j’avais un ami. Donc je l’ai fait venir chez moi se doucher et tout et je lui ai dit : « Écoute, moi, je m’en vais. Demain aussi. « Si tu veux, je te laisse les clés de mon appartement le temps « que je revienne. Tu sais que je pars à Nîmes. » Donc je lui ai proposé les clés de mon logement. Il m’a dit : « Non, je peux pas. » -Il a dit : « Non, je peux pas. » -« Je peux pas ». Il ne peut pas. -C’est pas pareil. -Non, mais après, je lui ai expli… C’est ce que je lui ai demandé. J’ai dit : « Mais pourquoi tu peux pas ? Là, t’as un appartement. « T’as une douche. T’as tout. » Il me dit : « Non, je suis pas prêt. Je veux pas. » -En fait, c’est pas que les gens ne veulent pas s’en sortir, mais souvent, c’est parce qu’ils ont pas les outils ou les moyens pour s’en sortir. Ça veut dire quoi, s’en sortir ? Ça, c’est une vraie question, ça. -Ouais, c’est vrai. -C’est une vraie question. Et moi, je suis désolée… Moi, des fois, on m’a proposé un logement. « Tiens, pendant cinq jours, je suis pas là. » Bah moi, ça m’intéresse pas, cinq jours, moi. Je préfère rester avec mes potes. -Il faut faire la distinction entre les sans-abris, les sans domicile fixe et les marginaux. D’accord ? Parce qu’être marginal, c’est quand même autre chose. Éric, c’est quand même… -Non, non. Je veux dire qu’ils sont résolument contre le fait de se réinsérer… -Voilà. Tout à fait. -Dans la société dite normale. -Mais on confond souvent les marginaux, les sans-abris, les sans domicile fixe. Ne pas vouloir s’en sortir, moi, j’ai encore jamais vu un sans-abri ou un sans domicile fixe me dire : « Non. Je ne veux pas m’en sortir. » « Je veux m’en sortir, mais je sais pas comment faire, », ça, je l’ai entendu. -La plupart voudraient trouver du travail. La plupart voudraient avoir leurs papiers en ordre, voudraient récupérer la… l’AME ou la CMU, voudraient récupérer tout. Mais le gros problème, excusez-moi, il y en a qui vont peut-être pas être d’accord, mais c’est l’administration… -Française. -Qu’est-ce qu’on est bloqués par ça ! -On est bloqués. -Je me suis battu pendant 7 ans, pendant plus de 7 ans pour avoir mon RSA. Et les réponses qu’on me donnait, c’est : « Vous n’avez pas de droit de séjour. » Est-ce qu’un Belge a besoin d’un droit de séjour pour avoir le RSA ? Je peux bosser. Je peux avoir la CMU. J’avais tout. Mais j’avais pas le RSA. -Mais le truc, c’est que c’est difficile de travailler en étant à la rue, parce que comme je vous disais, je travaillais. J’étais auxiliaire de vie à domicile. Et c’était très compliqué parce que bah non seulement je tombais malade régulièrement, parce que bah il y avait pas de chauffage dans ma chambre, donc je me réveillais le matin en plein hiver, je buvais de l’eau comme si elle sortait du frigo. Je tombais malade à répétition. La fatigue s’ajoute à ça, parce que bah forcément tout le temps du bruit, tout le temps des gens, tout le temps, tout le temps, donc du coup, j’étais très fatiguée, très affaiblie. Et puis le mental, aussi, tout simplement, parce que ça pèse. Et quand justement, je rentrais chez ces gens pour faire le ménage, je me disais : « Waouh. C’est bien chez eux. » Et puis même, sur le plan plus concret, charger un téléphone quand il y a pas tout le temps l’électricité. Si le réveil sonne pas, on fait comment ? -Bah oui. -Les deux derniers mois où j’étais sans abri sur Strasbourg, je travaillais le matin chez General Motors à monter des moteurs et le soir, je travaillais en zone allemande pour une autre grosse firme qui envoie des colis. Tu vois ce que je veux te dire ? Quand t’appelles le 115, quand tu dis pour trouver un logement, le 115, il te donne des héberge… Tu veux t’en sortir, hein. Je rentre dans le sujet « on veut s’en sortir. » -J’ai jamais réussi à avoir le 115, moi. Jamais. -Je trouve un travail. Je trouve un deuxième travail. J’appelle le 115 pour avoir un logement, le 115 me dit : « Oui, monsieur. Il y a pas de problème. « Allez à tel endroit. » Sauf que les horaires du tel endroit ne correspondent pas du tout à ton travail. Donc du coup, ils se retrouvent comme moi, à dormir sous une tente, comme toi, à pas savoir où te doucher, où te laver, parce que ton employeur, il va voir que tu pues ou que tes vêtements n’ont pas été lavés depuis deux jours ou trois jours. Et tu vas rebosser en te disant : « Ce soir, je redors au même endroit. » Tu veux t’en sortir. T’as de l’argent dans ta poche. Tu peux payer un loyer. Moi, je touchais deux salaires. Je pouvais me trouver n’importe quel loyer. J’ai visité 15 appartements différents pendant deux mois et au bout de deux mois, j’ai pris mon contrat en intérim. Ils m’ont appelé, ils m’ont dit : « Venez travailler, monsieur. » J’ai dit : « Allez vous faire… Allez vous promener. » « Être SDF, ça n’arrive qu’aux autres ». -On s’est tous dit ça. Rires. Bah on s’est tous déjà dit ça. Enfin, moi, dans ma vie, avant mes 19 ans, je me serais jamais dit, en voyant un SDF dans la rue, que ça pouvait m’arriver et que je me serais retrouvée à sa place un jour, enfin, ou que j’aurais été dans la même situation. Jamais. Et oui, je pense que ça peut arriver à tout le monde, parce qu’on n’est pas maître de toute sa vie. Il y a des choses qu’on peut pas prévoir, quoi. Des catastrophes qui arrivent où on peut pas les prévoir. Et des choses qu’on peut pas contrer. -Je pensais vraiment que c’était impossible que ça m’arrive. Par contre, c’est totalement différent de « ça peut arriver à tout le monde ». Moi, je pensais… Vraiment, je vivais avec le truc « ça n’arrive qu’aux autres ». C’est sûr qu’il va y avoir un truc. Moi, je suis pas croyant, mais j’avais envie de me dire : « Allez, si je fais des bonnes choses, des bonnes choses vont m’arriver. » Enfin, tout ce genre de trucs qu’on croit aujourd’hui. Bon en fait, moi, j’ai constaté que c’était totalement faux. Par contre, je sais bien qu’il y a des gens qui sont protégés pour toujours et sur des générations de… -Non, non, non. Il y a personne qui est protégé de la vie. Quand j’étais… À l’époque, il y a des années, j’étais encore… marié, des enfants, une super baraque, des super boulots, des très hauts boulots. Et puis un jour, j’ai fait un burn out. Et ça, un burn out, c’est un accident de la vie. Ça peut arriver à tout le monde, finalement. Mais tant que tu ne l’as pas, cet accident, tu n’y penses pas. Mais une fois que tu es dedans et que tu regardes un petit peu les gens qui sont dans la rue, tu vois… J’ai rencontré un prof, un ancien prof avec un bac+7. Un prof d’université qui, à 65 ans, s’est retrouvé sans retraite, sans rien. -Je dis toujours : « Ça peut arriver à tout le monde, mais pas « à n’importe qui. » Par exemple, moi, je viens de l’aide sociale à l’enfance. Bon, bah moi, déjà, c’était… Voilà. Je peux vous assurer qu’avec un… Si vous avez un entourage solide, vous ne tomberez jamais à la rue. Aujourd’hui, moi, j’ai plus d’un demi-siècle et je peux vous assurer que jamais, je retournerai dans la rue et ça, j’en suis sûre. -À l’époque, j’avais fait le choix, moi, d’aller à la rue et aujourd’hui, je me dis que… Si j’avais pas fait ce choix-là, je serais jamais tombé à la rue. Et moi, à l’époque, quand j’ai fait ce choix d’aller à la rue, je me disais : « Ça peut arriver qu’aux autres. « Lui, s’il est… » Franchement, j’avais une mauvaise vue des sans-abris, moi, à l’époque. Je disais : « Mais s’il est là, c’est qu’il a… C’est que c’est bien fait pour lui », limite. C’est ce que limite, moi, je me disais. Après l’avoir vécu de l’intérieur, je me dis : « Bah non. » Aujourd’hui, je ne retournerais pas dans la rue. Et avec l’entourage que j’ai, avec les amis que j’ai, avec les gens que j’ai aujourd’hui… Là, je vais dire quelque chose dont certains sont au courant… Il y a pas très longtemps, j’ai failli me retrouver encore de nouveau à la rue. Il y a moins de quelques semaines. Heureusement qu’il y avait l’Archipel des sans-voix qui était là. Heureusement qu’il y avait l’entourage qui était là. Heureusement qu’il y avait les associations qui, aujourd’hui, sont autour de moi et qui ont fait que je me sois pas retrouvé dans cette… Excusez-moi du terme, mais dans cette merde de me retrouver à la rue. -En tout cas, ce que je peux vous dire, moi, c’est que dans la rue, la majorité des gens, comme par hasard, c’est des gens issus de l’aide sociale à l’enfance. -C’est vrai que… Justement, j’allais rebondir sur ça. Il y a beaucoup de facteurs qui favorisent, effectivement. Mais il faut prendre en compte aussi qu’il y a des fois, on peut pas prévoir ce qui arrive et même si on essaye de le contrer, on n’y arrive pas et c’est comme ça. Et c’est pas une honte. On a beau se battre, ça marche pas. C’est comme ça. Mais effectivement, il y a des choses qui favorisent. Comme tu dis, l’enfance joue, évidemment, l’entourage, la famille proche et toutes les constructions qui se passent à ce moment-là. Les constructions primaires, effectivement, c’est hyper important. Ça, c’est clair. -Faut arrêter de détruire les campements. Faut arrêter de fermer les squats. Faut arrêter d’empêcher les gens de vivre comme ils veulent, quoi. Un abri pour tout le monde. Tout simplement. -Le message que j’ai envie de passer, c’est qu’on peut toujours s’en sortir. C’est dur, mais c’est possible. -Si un pauvre clochard comme moi avec le passé que j’ai, j’ai réussi, n’importe qui peut réussir.

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